La chenille processionnaire du pin représente un vrai danger pour nos chiens. Cette chenille correspond à un des stades immatures de développement d’un papillon de nuit nommé Thaumetopoea pityocampa. Ce papillon pond des oeufs d’où sortent les chenilles à l’automne. Ces chenilles partent ensuite dans les pins pour se nourrir d’épines de pin. En hiver, elles fabriquent un nid de soie à l’extrémité des branches de pins pour se protéger du froid.
Finalement, au printemps, elles sortent du nid et se mettent en procession pour descendre de l’arbre à la recherche du meilleur endroit pour se métamorphoser en papillon. Ce sont ces processions qui ont donné le nom à cette espèce de papillon, on peut en effet voir au printemps des groupes de chenilles en file indienne arpenter les branches.
Au niveau mondial, les chenilles processionnaires du pin sont présentes sur plusieurs continents : Etats-Unis (où elles pullulent), Europe et Afrique du Nord où elles sont retrouvées plus particulièrement dans les pays méditerranéens (sauf l’Egypte) : France, Grèce, Italie, Algérie, Albanie, Croatie, Liban, Maroc, Tunisie, Turquie, Espagne, Portugal, Chypre, Hongrie, au nord de la Bulgarie, en Autriche, en Suisse et en Yougoslavie.
En France, on les retrouve sur une grande partie du territoire, principalement dans les zones sous influences océanique et méditerranéenne : le long de la côte méditerranéenne, en Corse et sur la côte Atlantique (de la Bretagne au Pays basque). Depuis plusieurs décennies, la chenille processionnaire du pin remonte vers le Nord et en altitude dans les Alpes, le Jura, les Pyrénées et le Massif Central, suite au réchauffement climatique, elle n’est donc plus l’apanage des climats méditerranéens (cf carte).
Il est à noter qu’il existe aussi une chenille processionnaire du chêne (Thaumetopoea processionea) qui fait ses processions de mai à juillet, elle est moins fréquente que sa cousine et ses processions se font plutôt sur les branches des arbres que sur le sol, elle est donc moins accessible pour les chiens. Par contre sa répartition géographique est plus vaste car on la retrouve facilement en Belgique et aux Pays-Bas. Le danger est le même pour les chiens.
Danger pour le chien
Ces larves de chenille ont un aspect duveteux qui suscite la curiosité du chien. Le chien veut jouer avec elles en les attrapant avec sa gueule. Malheureusement, les chenilles ont un corps recouvert de “poils urticants”. Ce sont des poils ressemblant à des mini harpons qui, quand ils pénètrent dans la peau, ne peuvent plus ressortir. Ces poils sont en plus recouverts d’une substance urticante appelée « thaumétopoéine » qui provoque des réactions allergiques non spécifiques. Il y a donc une action double : à la fois mécanique par la pénétration des poils et chimique par la thaumétopoéine.
Tableau clinique chez le chien
Après avoir eu des poils urticants dans la gueule, une forte inflammation de la langue et de l’intérieur de la bouche va se développer :
- rougeur, gonflement, douleur.
- La langue va grossir et sortir de la bouche.
- Les lèvres et les babines vont gonfler donnant un « faciès d’hippopotame »
- Le chien ne peut alors plus déglutir ou manger, il se met à baver excessivement.
Les atteintes cutanées sont moins fréquentes, elles s’apparentent à une crise d’urticaire classique (démangeaisons, rougeur).
Les symptômes généraux sont très rares mais peuvent être graves (forte fièvre, abattement).
Après évolution, les lésions de la langue évoluent vers des ulcérations voire de la nécrose.
Le gonflement des tissus mous peut aussi provoquer des étouffements.
Les chats peuvent aussi être concernés et développeront les mêmes symptômes que les chiens, toutefois leur comportement plus prudent les éloigne de ces chenilles bizarres.
Si vous pensez que votre animal de compagnie est entré en contact avec ces chenilles du pin ou du chêne, consultez immédiatement votre vétérinaire le plus proche.
Premiers secours
Si vous pensez que votre animal de compagnie est entré en contact avec des chenilles processionnaires, ceci est une urgence et vous devez consulter immédiatement votre vétérinaire le plus proche.
Plus le vétérinaire interviendra tôt, plus les chances de réussite du traitement seront grandes. 2 points sont très importants :
- il ne faut pas frotter les zones concernées pour enlever les poils urticants car cela peut les casser et libérer encore plus de thaumétopoéine.
- La thaumétopoéine est tout aussi nocive pour les humains, alors assurez-vous de porter des gants de protection, un masque, et des manches longues quand vous manipulez votre chien
Comme premiers soins, vous pouvez commencer par rincer la bouche du chien avec beaucoup d’eau.
Traitement
Le but du traitement est d’abord d’enlever un maximum de poils urticants et d’associer un corticoïde (action anti-inflammatoire et anti-allergique), un histaminique (action anti-allergique) et enfin une couverture antibiotique quand les lésions d’ulcération et de nécrose sont déjà avancées.
Sur la peau : le vétérinaire va d’abord retirer les poils sans frotter afin de ne pas les casser. Ainsi, l’utilisation d’une gaze humide, d’une bande adhésive (ou scotch) ou d’un lavage doux par pulvérisation d’eau javellisée à 1% permettra d’enlever les poils non encore implantés sans les casser. L’eau vinaigrée calmerait la douleur.
Dans la bouche : rinçage de la bouche à l’eau froide, compresse humide sur la langue.
Le chien ne pouvant s’abreuver correctement une perfusion est généralement mise en place.
Le pronostic d’une envenimation par des chenilles processionnaires du pin peut être incertain, même si de nombreux cas sont bénins.
Lorsque le traitement est mis en place rapidement (= dans les premières heures suivant le contact), le pronostic est généralement bon et la vie du chien n’est pas en danger. L’évolution est généralement favorable et les lésions bénignes guérissent en 8 à 10 jours. Lorsque le traitement est tardif (plus de 24 heures après le contact) ou si le contact avec les poils urticants a été intense (grand nombre de poils ou contact de longue durée), l’inflammation de la langue et de la bouche évolue rapidement de façon ulcéreuse à nécrosante sur une surface étendue. Les lésions linguales nécessitent rarement une intervention chirurgicale. Il est recommandé de laisser la partie nécrosée tomber spontanément. La perte du bout de la langue est relativement fréquente (un chien s’adapte rapidement à ce changement, il est alors recommandé de le nourrir avec une alimentation liquide puis molle dans les premiers jours). Les cas mortels restent heureusement rares, mais l’euthanasie est parfois la seule issue possible lorsque la nécrose linguale s’étend trop loin en arrière.
Mesures préventives
Lors de la période des processions (de février à mai pour les chenils processionnaires du pin ou de mai à juillet pour les chenilles processionnaires du chêne), il convient d’être particulièrement vigilant pendant les balades avec son chien : il est recommandé de tenir son chien en laisse dans les zones à risques pour éviter que celui-ci n’entre en contact direct avec les chenilles, les nids, ou des supports infestés, une muselière pourra aussi éventuellement éviter que ça bouche n’entre en contact avec les chenilles.
Crédit Photo :
Image 1 : cc by 2.0 par rabiem22 sur FlickR
Image 2 : cc by 2.0 par Steve Slater sur FlickR
Image 3 et 4 : Inra
Image 5 : Les carnets du Lépidoptériste français
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